Comment coopérer efficacement entre générations ?

De quoi parle-t-ton quand on utilise le terme « intergénérationnel » ? On pourrait le résumer à la façon et la capacité à faire travailler les générations ensemble. Ce sujet n'est pas récent dans le sens où il y a déjà une dizaine d'années, quand la génération Y était arrivée sur le marché du travail, on parlait beaucoup de comment arriver à travailler, à manager, à gérer cette nouvelle génération qui a priori n'a pas les mêmes aspirations que les autres générations et il y avait beaucoup de cristallisation autour de cela. On entendait aussi : « Ils ne sont pas manageables, ils ne sont pas engagés, ils ne sont pas motivés. ».

Cela continue de perdurer avec la génération Z, mais ce qu'on entend maintenant le plus fréquemment dans les entreprises et qui se trouve être assez nouveau depuis quelques années, c'est : « Les anciens ou les plus vieux, de toute façon, ils ne sont pas capables d'apprendre les nouvelles technologies, ils vont être dépassés, ils n'ont pas envie de se développer sur ce genre de choses. ».

On commence à entendre des choses qui cristallisent finalement des oppositions et si on prend un peu de recul, on est typiquement dans une logique de préjugé comme on l'a sur le préjugé de genre. C’est à ce moment-là que le sujet commence à devenir crispant, et il devient un enjeu important pour les organisations.

Aude Bohu, Directrice Générale Adjointe de Talentis et Executive Coach, nous parle plus en détails de ce sujet.

Quelles crispations empêchent les générations de coopérer ?

Les crispations, qu'est-ce que c'est ? On pourrait dire que globalement, il y a un désintérêt peut-être parfois des jeunes pour les plus vieux en se disant : « On ne peut pas travailler avec eux ou on n'arrive pas les mobiliser parce que, de toute façon, ils n'ont pas envie. » On sent des résistances de part et d'autre, d'aller les uns vers les autres et de faire des choses ensemble.

Or la réalité, c'est que c'est une énorme opportunité de les faire travailler ensemble parce qu'il y a l'expérience d'un côté et peut-être des nouvelles idées, une nouvelle façon de voir les choses de l'autre. Et aujourd'hui, cet enjeu, il est qu'on va se focaliser sur ce qui nous sépare et non pas sur ce qui nous rapproche.

Tout ça, c'est une question d'état d'esprit. Est-ce que j'ai un état d'esprit qui me donne envie d'apprendre, de me développer, d'être dans l'ouverture ou est-ce que j'ai un état d'esprit finalement qui est statique ? C'est vraiment le fixed mindset par rapport au growth mindset dont on parle beaucoup aujourd'hui. Soit j'ai un état d'esprit qui a envie de se mobiliser, de se challenger et d'aller de l'avant, soit j'ai un état d'esprit qui est plus fixe, qui reste plus dans la situation actuelle.

Comment l’entreprise peut-elle aider ces générations à coopérer ?

Donc c'est là-dessus qu'il faut travailler et ce n'est pas parce qu'on est jeune ou vieux, ce n'est pas ça qui va faire la discrimination. C'est vraiment la façon dont j'aborde les choses, la façon dont j'ai envie de grandir, la façon dont j'ai envie de contribuer à mon entreprise.

Donc on en revient toujours au même sujet : le projet que l'entreprise va être capable de donner à l'ensemble de ses salariés en les réunissant autour de projets spécifiques, autour du projet de l'entreprise, autour de tout type de mission et en les faisant se croiser les uns les autres au maximum.

Finalement, pourquoi on entend genre de choses ? C'est qu'en réalité, ils ne se connaissent pas. Alors que quand on les réunit, quand on les met autour d'un projet, là, il va y avoir du frottement positif qui va créer des étincelles et c'est de là que va se nourrir des innovations.

Il y a certes l'expérience que les plus âgés ont pu accumuler, mais il y a d'autres types d'expériences que les plus jeunes ont également. Ce sont des expériences notamment sur toutes les nouvelles technologies, ou ils sont allés apprendre par d'autres biais, etc. Et tout ça, ça se nourrit et ça s'enrichit pour un projet commun.

Donc le sujet, il n'est pas génération X, génération boomer, génération Y, génération Z. C'est comment on arrive à travailler ensemble autour d'un projet commun. Et ce projet-là, c'est aussi l'entreprise qui doit le proposer ou bien laisser aussi les gens s'organiser dans l'entreprise pour proposer quelque chose en commun.

Et que peut-on proposer aux managers ?

Quand vous êtes un manager et que vous avez une équipe à construire, essayez, si vous êtes jeune, de ne pas faire du jeunisme, essayez, si vous êtes plus âgé, de ne pas faire que d'avoir des gens qui ont la même expérience que vous. Mixez les expériences autour de vous, c'est la première chose qui est importante.

La deuxième chose, c'est au maximum encourager le travail en groupe, le travail avec des équipes mixtes. Éventuellement, si vous sentez qu'il y a des frictions autour de ça, posez-les. Qu'est-ce qui nous rapproche ? Qu'est-ce qui nous accroche ? On les pose et on voit et on avance ensemble. L'idée, c'est ouvrir un dialogue, une proximité.

Comment les différentes générations chez Talentis coopèrent-elles ?

Chez Talentis, on est une équipe d'une vingtaine de personnes. On a cinq dizaines représentées, de 20 ans à 60 ans. On se posait la question en se disant : « Finalement, qu'est-ce qui nous réunit ? Qu'est-ce qui nous sépare ? ».

Ce qui nous réussit, c'est probablement ce projet, cette dynamique, cette envie et cet état d'esprit d'apprendre, cet état d'esprit d'ouverture, de curiosité les uns pour les autres, d'avoir envie de se nourrir de l'un, de se nourrir de l'autre et de laisser à chacun la possibilité de s'exprimer quel qu'il soit, avec l'expérience qu'il a et de valoriser les idées de tout le monde. Vous pourriez penser que c'est facile à notre échelle parce qu'on est 20, mais c'est un peu la même chose avec une grande équipe.

Si chaque manager à son échelle, dans sa propre équipe, arrive à construire ce genre de choses, il est fort à penser qu'après, les organisations vont aussi évoluer comme ça. Il y a le projet de l'entreprise, mais il y a aussi tout ce que chaque manager peut faire à son propre niveau.

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